À emprunter le chemin sur lequel nous convient les travaux d'Aurélie Gaillard, nous pouvons éprouver le malaise et le trouble de celui ou celle qui ne sait pas bien à quoi s'en tenir. Une tension palpable émane des œuvres elles-mêmes. Des formes, des couleurs, des textures, de la minutie des gestes, découle la tendresse d'un accueil, le souci de l'autre, pour ainsi dire un certain sens de l'hospitalité. Pourtant, la violence des thèmes, l'intensité pulsionnelle, le caractère physique, sexué, organique des représentations nous conduit simultanément à une confrontation vive, parfois douloureuse, avec nos propres démons intérieurs ainsi qu'avec les déchirements de l'histoire de l'humanité.
N. J.
Installation "Les Feuillets voilés de nos Lumières", parvis de la Mairie d'Oullins, fête des lumières, 8 décembre 2014. 2 séries de voilages de 10 x 3 m. Tissu, acrylique, poupées, couture, guirlandes lumineuses.
Si au XVème siècle la « guirlande » fut une couronne de métal précieux, elle désigna aussi, ultérieurement, un recueil de poésies galantes : hommage au féminin par la parure autant que par les mots. C’est sous l’égide de ce double symbole que s'est déployée la guirlande de voilages installée sur le parvis de la Mairie pour la « Fête des lumières ». Au centre de la fresque éphémère, robes cousues et étoffes carminées incarnaient la femme en sa fragile présence — pourtant protectrice, à l’image de celle pour laquelle s’allument les feux du 8 décembre. Si les oiseaux évoquaient paix et liberté, les traits de flèche y apportaient leur indépassable antagonisme. A chacun d’élaborer ensuite sa lecture du duel et de son franchissement. Hautain ou dédaigneux, le cerf, animal souverain (mais aussi trophée de chasse) semble s’en désintéresser. De ce conte onirique où se mêlent l’écho du fracas des armes et l’horizon de la paix, animalité et humanité, on pourra voir se refléter une facette du monde contemporain et de l’existence. Dans le clair-obscur des rideaux et voilages, se donnent à lire les feuillets voilés de nos Lumières. Quant à la présence vivante des danseurs, au sein de l’installation, elle a permis d'animer de ses intentions et de son dialogue cet hommage à l’espérance là où nos balises se troublent et où nos fanaux s’obscurcissent.